Une salle d’attente anonyme, une revue quelconque pour passer le temps et oublier l’interminable attente. Une photo, et l’imagination s’envole.
Belle, sensuelle, désirable, elle attend qu’il ait fini la mise au point.
Il l’a voulue ainsi, choisissant jusqu’au plus petit détail. Il l’a regardée enfiler ses bas, lui demandant de le faire en caresse de peau. Il l’a embrassée du regard quand elle a fixé les jarretières.
Il savait qu’elle était féline, que chaque geste serait une tentative de séduction.
La lumière est douce, il a tout prévu. Les photos s’enchaînent. Il sait ce qu’il veut. Elle est là, provocante, arrogante, ne laissant que par moments son regard glisser vers l’objectif.
Il veut l’instant précis, ce détail, ce petit quelque chose qu’il avait saisi chez elle. Il le veut plus que tout.
Maintenant, il enrage de la voir déambuler devant son objectif, elle ne donne rien d’elle, son regard est ailleurs.
Une dernière tentative, il lui présente des escarpins aux talons démesurés. Elle le toise, sourire en coin. Pose sa main sur son épaule, le frôle de son parfum oriental. Elle est aussi grande que lui maintenant. Il sent son souffle sur son cou quand elle se redresse.
Regards qui se croisent, joute en demi-sourire. Il a la bouche sèche. D’un geste, il lui donne les instructions. Retour derrière l’appareil photo.
Elle ondule. Son regard se refuse toujours. Il n’y arrive pas, éteint les lumières, remonte les stores.
Dans son carcan de séductrice, sans un mot, elle le regarde quitter la pièce. Il disparaît. Revient avec deux tasses fumantes. Elle fait valser les escarpins. Sensuellement, elle hume le café, caresse le bord de la tasse, réchauffe ses mains à son pourtour.
Il est aux anges, voilà ce qu’il a vu ce matin-là à la terrasse du café : une chatte devant une gourmandise.
L’appareil photo est à portée de main, doigt sur le déclencheur.
Silencieux, ils dégustent l’instant présent.
Kristine Lillouarn
[Chroniques de l'îlot Rêveur, sur le bord du monde]
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